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jeudi 29 septembre 2016

Fiscalité des droits d’auteur : avantage à l’artiste

En Belgique, les revenus de droit d’auteur sont faiblement taxés jusqu’à un certain seuil. Si les avantages sont réels, des pièges doivent être évités.

Quand est-on titulaire de droits d’auteur ?

Pour rappel, la protection par le droit d’auteur est automatique si deux conditions cumulatives sont remplies, à savoir :

- La mise en forme, c’est-à-dire le fait que l’œuvre doit avoir été exprimée dans une forme perceptible (un dessin, une peinture, un fichier informatique,…) par opposition à l’idée de l’œuvre qui ne sera pas protégée.
- L’originalité, c’est-à-dire le fait que l’œuvre doit constituer une création intellectuelle propre à son auteur.

Ce n’est que si ces deux conditions sont remplies que l’auteur peut revendiquer une protection sur sa création, et qu’il peut l’exploiter par le transfert de droits qu’il détient sur celle-ci en faveur d’un tiers. C’est cette exploitation qui lui permettra d’acquérir un revenu.

La taxation en droit d’auteur

En Belgique, les revenus en droit d’auteur sont taxés en tant que revenus mobiliers. Le taux applicable jusqu’à un montant de 57.590 EUR (revenus de 2016 – indexé chaque année) est de 15%. Ce taux peut même être encore plus avantageux en cas d’application de frais forfaitaires.

Le plafond ainsi fixé permet à de nombreux artistes, interprètes, musiciens, écrivains, designers, créateurs de mode, mais aussi à de nombreuses personnes en dehors du secteur culturel, de percevoir des paiements en droits d’auteur et de bénéficier de ce régime avantageux (par comparaison à la taxation des revenus professionnels). En effet, la plupart des auteurs ne dépasseront pas le plafond de 57.590 EUR.

Si ce plafond est dépassé, les revenus de droits d’auteur seront soumis aux taux d’imposition progressifs applicables aux revenus professionnels, allant jusqu’à un prélèvement de 50% ; sauf si les revenus ne proviennent pas d’une activité professionnelle, auquel cas ce sera toujours le taux de 15 % en tant que revenus mobiliers qui s’appliquera.

Le débiteur des droits d’auteur doit retenir à la source un précompte et remplir une fiche fiscale 281.45 sur laquelle il devra reprendre, outre le montant des droits payés, quelques données d’identification du bénéficiaire auteur.

Le paiement en droit d’auteur est subordonné à un ensemble de conditions, faute de quoi le risque de requalification en revenus professionnels par l’administration fiscale serait bien réel.

Les conditions et le contrat

Il ne suffit pas de reprendre sur une facture un montant à titre de droit d’auteur pour bénéficier du régime décrit ci-dessus.

Le premier élément que les professionnels de la matière analyseront sera l’existence potentiel d’une protection par le droit d’auteur sur l’œuvre visée. Autrement dit, l’œuvre répond-t-elle aux conditions d’originalité et de mise en forme visées ci-dessus ? Si ce n’est pas le cas, il ne serait pas possible de céder des droits puisque ceux-ci n’existent pas.

La seconde condition porte sur le transfert des droits. L’artiste ne peut justifier un paiement en droit d’auteur s’il n’a pas, d’une manière ou d’une autre, cédé ou donné en licence ses droits en faveur d’un tiers.

Ce contrat nécessite une rédaction adéquate et précisera certaines mentions obligatoires relatives à la durée, l’étendue géographique, les droits cédés et le montant y correspondant. Cette rédaction sera idéalement faite par un expert en la matière.

Quelques exemples 

Les illustrations ne manquent pas. Songeons au contrat d’édition entre un écrivain et une maison d’édition en tant qu’exemple évident. Songeons également à la galerie qui souhaite éditer une monographie d’un artiste qu’elle représente pour laquelle ils conviennent d’une cession de droits, ou encore les photographes qui cèdent le droit de reproduire leurs créations à leurs clients (un magazine, une société) ...

Si ces exemples sont courants, il arrive aussi qu’un chef d’entreprise, le cas échéant dans le cadre d’une activité professionnelle sans aucun lien avec le secteur culturel ou créatif, décide de céder ses droits d’auteur à sa société. Une telle démarche est tout à fait légale puisque la protection par le droit d’auteur n’est pas réservée au secteur culturel. Il est concevable de considérer de nombreux documents écrits comme protégés par le droit d’auteur, même si ceux-ci n’ont pas pour vocation de constituer une œuvre artistique… Cette réalité découle de la condition d’originalité attachée à l’œuvre sur laquelle la protection est revendiquée : si l’œuvre reflète la personnalité de son auteur (ce sera souvent le cas), la condition est déjà remplie. 

Fort de ce constat, beaucoup d’entrepreneurs cèdent leurs droits d’auteur à leur société afin de bénéficier de l’avantage fiscal qui en découle.

Un contre-exemple

De nombreux artistes plasticiens envisagent de vendre une œuvre moyennant un paiement en droit d’auteur. Une telle manière de procéder les mène inévitablement à des difficultés en cas de contrôle fiscal. Et pour cause : la vente d’une œuvre porte sur un transfert d’un droit de propriété du vendeur (l’artiste plasticien) vers un acheteur (le collectionneur). Il n’y a donc aucune cession de droits d’auteur…

Il ne fait donc pas confondre le transfert de la propriété d’une œuvre d’art (constituant, le cas échéant, un revenu professionnel dans le chef de l’artiste) avec la cession des droits d’auteur sur cette œuvre.
L’administration fiscale

Quel est la position de l’administration face à de telles pratiques ?

Avant tout, il faut rappeler que l’administration fiscale a pour tâche d’appliquer les règles de droits votées par le parlement. Son approche n’est donc pas négative à la base, mais il convient d’éviter certains pièges.

Le premier élément à analyser porte sur la réalité de la cession des droits d’auteur : point d’avantage fiscal s’il n’y a pas eu un contrat de cession ou de licence des droits signés en bonne et due forme.

En cas de ventilation sur une facture émise par l’auteur entre un paiement pour les prestations effectuées d’une part et la cession de droit d’auteur d’autre part, l’administration examinera l’ampleur de cette ventilation. Hors de question de prévoir un paiement à 90% en droit d’auteur là où l’auteur a réalisé une commande pour le client et donc presté... Dans ce cas, il faut qu’il perçoive à titre de revenus professionnels une rémunération pour les prestations effectuées.

Selon les cas, l’administration peut accepter une ventilation allant jusqu’à 50%. 

Un doute ?

En cas de doute, et pour éviter une requalification fiscale du revenu, il est recommandé de passer par le service des décisions anticipées avant de mettre en œuvre la convention de cession. Ceci permet d’avoir une décision de l’administration quant au projet de convention et sur l’éventuelle ven
tilation entre revenus mobiliers de droits d’auteur et les revenus professionnels.

La sécurité juridique, fondamentale en matière fiscale, est à ce prix.